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Blog régional de l'association Survie (Aude, Gard, Hérault,Lozère,Pyrénées-orientales)

samedi 26 décembre 2009

Les réseaux de la mort : Une milice terroriste de Rwandais hutu blanchit son argent en Allemagne

Un rapport de l’ONU sur le FDLR-business
par François MISSER et Dominic JOHNSON, Die Tageszeitung, 25/11/2009. Traduit par Michèle Mialane et édité par Fausto Giudice, Tlaxcala
 
Un rapport d’enquête de l’ONU, non rendu public, sur les affaires de la milice hutu rwandaise FDLR met en cause des pays d’Europe, d’Afrique et d’Asie. La Tageszeitung (Berlin) en a eu communication en avant-première.


Des comptes en banque aux USA : des combattants de la FDLR à Masisi


BERLIN/BRUXELLES taz - Le Conseil de sécurité de l’ONU à New York  a mis à son ordre du jour de mercredi dernier un rapport d’enquête confidentiel explosif, qui devrait faire de la peine à beaucoup de ses membres. Le groupe d’experts onusiens chargé de la surveillance des sanctions contre les groupes armés en République démocratique du Congo dévoile dans un rapport dont la taz a eu communication en avant-première les réseaux de soutien à la guerre que mènent les milices hutu rwandaises FLDR (Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda) dans l’Est du Congo. Une partie des chefs de la FLDR se recrute parmi les coupables du génocide rwandais. Leur Président Ignace Murwanashyaka et leur vice-président Straton Musoni sont depuis peu emprisonnés en Allemagne.


Ignace Murwanashyaka


Selon le rapport, les sanctions et l’embargo imposés par l’ONU ont été contournés à  partir de l’Allemagne, entre autres. Murwanashyka aurait participé à « la coordination de transferts d’armes et munitions destinées à des unités de la FDLR » et aurait contribué « à administrer de grosses sommes d’argent  issues de la vente de ressources naturelles en provenance des zones contrôlées par le FDLR. »
Les cinq membres permanents du Conseil de sécurité en prennent chacun pour leur grade : la France, qui héberge elle aussi des chefs du FLDR ; la Grande-Bretagne, où des firmes impliquées ont leur siège social ; les USA, qui abritent des comptes en banque ; la Russie et la Chine, qui ont acheté des produits miniers en provenance de l’Est du Congo. En outre la Chine, l’Ukraine, la Belgique , l’Espagne et le Soudan livrent des armes au Congo.
Le Conseil de sécurité de l’ONU risque de ne pas rendre public le rapport dans son intégralité. La Chine aurait demandé qu’il soit d’abord traduit en cinq langues, ce qui ressemble à une manœuvre dilatoire. Mais il semble très improbable que le Conseil fasse simplement l’impasse dessus.

La milice  hutu et ses complices
Les réseaux de la mort

Officiellement les milices FDLR sont soumises à des sanctions de l’ONU, mais elles reçoivent des soutiens de toutes parts - de Tanzanie et même de l’Église catholique.

Sous les ordres d'un milicien des FDLR, des civils du Congo oriental détruisent un pont. Photo rtr

La piste la plus étrange mène aux Baléares. Le gouvernement des deux paradis de vacances insulaires méditerranéens finance deux organisations caritatives catholiques, Fundació S‘Olivar et Inshuti. En quoi cela peut-il intéresser le groupe d’experts onusiens chargé de la surveillance de l’embargo contre les groupes armés de la République démocratique du Congo ? Son nouveau rapport, aujourd’hui à l’ordre du jour du le Conseil de sécurité de l’ONU et que l’avant-première du taz vous offre  en exclusivité, vous fait pénétrer dans le monde secret des réseaux mondiaux qui permettent à la milice hutu FDLR (Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda), dont les chefs se recrutent en partie parmi les coupables du génocide rwandais, de poursuivre son interminable guerre.
Le Président d’Inshuti, Joan Casoliva, aurait selon le rapport promis 200 000 dollars aux FDLR. Les FDLR aurait reçu des deux organisations abondées par l’État espagnol « un soutien financier, logistique et politique régulier ». Des détails : la Fundació S’Olivar financerait  la fondation Brothers of Charity du prêtre belge Constant Goetschalck, basée il y a peu encore à Kigoma en Tanzanie et plaque tournante du trafic d’armes. Cette fondation aurait transféré de l’argent à un certain Ahadi Institute qui l’aurait fait parvenir aux FDLR. Un missionnaire italien au Congo oriental, Pier Giorgio Lanaro, a confirmé avoir transmis à la  milice  l’argent collecté en Europe.
Ce ne sont pas seulement les détails sur la vie interne de l’Église catholique qui font de ce nouveau rapport d’experts onusiens une lecture d’une brûlante actualité. Les experts de l’ONU apportent de nouvelles précisions sur le rôle peu reluisant de l’Allemagne, où les chefs de la FDLR vivaient encore récemment en toute impunité (voir texte ci-dessus). Il analyse les liaisons par téléphone satellitaire des chefs de campagne  du FDLR  du Congo vers 25 pays dans le monde, dont l’Allemagne, la France, la Belgique, la Norvège et les Pays-Bas. En France, où vivent le secrétaire exécutif des FDLR, Callixte Mbarushimana, ainsi que les commissaires à la politique intérieure et étrangère, Emmanuel Ruzindana et Ngirinshuti Ntambara , comme en Grande-Bretagne et aux USA, les autorités se sont refusées à communiquer le nom des personnes en communication. Mais en Belgique on compte parmi les appelants d’ex-chefs militaires rwandais de l’époque du génocide, qui maintenant soutiennent les FDLR. Il existe également des contacts téléphoniques entre les FDLR et le FDU-Inkingi, le parti rwandais en exil dont la Présidente, Victoire Ingabire, qui vit actuellement aux Pays-Bas, veut être candidate aux prochaines présidentielles du Rwanda et fait sa campagne en Europe sous l’étiquette « d’opposition modérée ».


Callixte Mbarushimana (Photo Interpol) 


Victoire Ingabire Umuhoza


Les réseaux financiers européens permettent aux FDLR de s’armer. La milice ne se contente pas de faire main basse sur les armes actuellement en circulation au Congo, elle importe de l’armement venu de Tanzanie via le lac Tanganyika. Bande Ndangundi, un vieil ami  de l’ex-Président du Congo, Laurent-Désiré Kabila, coordonne à partir de Dar Es Salam  en Tanzanie des fournitures d’armes aux FDLR via le Burundi. Il aurait selon les experts de l’ONU des liens étroits avec le gouvernement hutu du Burundi et des officiels de haut rang du gouvernement, de la police et de l’armée tanzaniens. Cette année il aurait eu de fréquents contacts téléphoniques avec un armateur portugais et une entreprise ougandaise de trafic aérien.
Ce business devrait permettre à tout un groupe de responsables tanzaniens de maintenir leur « influence (dans les intérêts) politico-économique » au Sud-Kivu. Une lourde accusation portée par l’ONU. Du carburant passe en contrebande de la Tanzanie vers le Congo, des produits miniers font le chemin inverse. Le Burundi, gouverné depuis 2006 par un ex-mouvement de la rébellion hutu, serait « une base arrière du recrutement pour les FDLR et les réseaux de sympathisants ». Les FDLR entretiendraient des relations étroites avec Adolphe Nshimirimana, le patron  des services secrets burundais, et avec la direction de la police burundaise. Récemment la police burundaise aurait envoyé une délégation en Malaisie pour y acheter 40 000 fusils d’assaut, deux fois plus que ce petit pays ne compte de policiers.
Ce sont les exportations de produits miniers (essentiellement de l’or et du minerai d’étain) qui fournissent aux FDLR les fonds nécessaires. Les marchands d’or  congolais qui collaborent avec les FDLR y travaillent avec des partenaires en Ouganda, au Burundi et à Dubaï. On trouve parmi les acheteurs la Malaysia Smelting Corporation et la  Thailand Smelting and Refining Corporation. Cette dernière est propriétaire de la  Londoner Amalgamated Metals Corporation, son principal fournisseur est selon l’ONU l’African Ventures Ltd, enregistrée aux îles Samoa et installée à Hong-Kong, où son  représentant sur place est l’homme d’affaires suisse Chris Huber. Ce dernier achèterait également des produits miniers fournis par d’anciens rebelles tutsi, qui depuis leur incorporation dans l’armée congolaise contrôlent les districts miniers.
Les armes destinées aux FDLR proviennent aussi de l’armée congolaise elle-même ; ses chefs en charge de la province du Sud-Kivu entretiennent d’étroites relations avec les FDLR et tolèrent, voire mettent en œuvre des transferts d’armes, tout en combattant officiellement la milice. Le gouvernement du Congo, lui, importe des armes d’Europe et d’Asie. Selon l’ONU, le cargo nord-coréen « Bi Ro Bong » chargé de 3 435 tonnes d’armes destinées à l’armée congolaise a accosté le 21 janvier dernier dans le port de Boma, sur l’Atlantique. En  mai c’était au tour du cargo chinois « An Xin Jiang » de déposer dans le port voisin de Matadi d’autres armements. Ni le Ministère de la Défense de Corée du Nord, ni celui de Chine, ni celui du  Congo n’ont souhaité répondre aux questions des experts de l’ONU à ce sujet.
À Kisangani, dans l’Est du Congo, ont atterri entre septembre 2008 et février 2009 18 avions en  provenance de la capitale soudanaise, Khartoum, transportant des frets destinés à l’armée. Des véhicules blindés en provenance de Chine, de Belgique et d’Espagne sont arrivés au Congo ces derniers mois, ainsi que des hélicoptères de combat  ukrainiens, maintenant stationnés à Goma, dans l’Est du Congo et dont la maintenance est assurée par des Ukrainiens et des Biélorusses.
FDLR : les FDLR (Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda) sont une milice opérant en  République démocratique du Congo et composée de combattants hutu rwandais issus des organisations qui pont perpétré en 1994 le génocide rwandais. Leur président Ignace Murwanashyaka a pendant des années dirigé le groupe à partir de l’Allemagne où il a été arrêté le 17 novembre dernier.
Groupe d’experts onusiens : Un embargo sur les armes décrété par l’ONU pèse sur les groupes armés congolais, incluant des interdictions de se déplacer  pu d’effectuer des transactions financières. Les livraisons d’armes au gouvernement congolais doivent être déclarées. Des équipes d’experts informent des violations de l’embargo le comité onusien compétent en matière de sanctions. Ces informations servent de base à l’ONU pour établir des mesures de rétorsion. 




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