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Le Professeur Issa N'DIAYE, mai 2014 |
«Qu’allons-nous
faire ?... Du 19 Novembre [1968] à ce jour, qu’ont fait nos
gouvernements ? Pas grand-chose.Nous assistons à une période faite
de résolutions creuses, de vœux pieux, de détournement de
légitimité. Le Mali traverse une histoire où la violence a pris le
pas sur la raison. Nous, jeunes du Mali, quel est notre avenir? Nous,
femmes du Mali, quel est le nôtre ? Suivre tout simplement ?
Peut-être pas ! Nous sommes fatigués d’un futur sans lumière. Il
est temps que nous prenions conscience que nous sommes seuls et
qu’être assisté en permanence, c’est être colonisé. Ici et
là, jeunes et femmes, redressons la tête et les gouvernants seront
nus. Redressons la tête pour qu’ici et là, la démocratie jeune
et nouvelle, animée par le sang des martyrs… que les fascistes
nous ont volée, refasse surface. Le printemps malien que nous vivons
en ce moment manque cruellement d’expériences, de perspectives et
surtout d’hommes et de femmes capables de l’animer. Mettons-nous
dans la tête que lorsque nous disparaîtrons, nous emporterons avec
nous une conviction. Il n’existe pour ainsi dire pas de problèmes
insolubles, mais il y a peu d’hommes qui soient capables de trouver
les solutions adéquates. Ce n’est pas que les hommes de nos jours
soient sots, mais ils sont trop impliqués dans la gestion de leurs
affaires quotidiennes. Ils n’ont plus le temps, ni la force, ni les
idées pour regarder au-delà. Ils sont résignés…
»
Ibrahima
Ly :
Extrait de l’Appel lancé par le Regroupement des Patriotes Maliens
lors du Référendum constitutionnel de 1974.
Les
anciens disaient que le pouvoir était un révélateur redoutable,
qu'il mettait à nu celui qui l'exerçait, ses qualités, ses
ressorts intimes et surtout ses défauts. Selon une sagesse
populaire, le pouvoir est comme un fusil chargé à bloc dont il faut
se méfier. Il ne faut jamais en faire un jouet. Il ne faut ni
s'amuser avec, ni s'y accrocher. Certes, il faut le tenir fermement mais
sans s'y agripper. En s'y agrippant trop, on en devient le jouet. Au
lieu de diriger le pouvoir, il finit par vous diriger. Pour Amadou
Hampâté Ba, le pouvoir est une drogue. Il agit à l'instar de
l'alcool. Au premier verre, on est joyeux et on gambade dans tous les
sens comme un cabri. Au second, on se prend pour un lion qui veut
tout régenter. Au troisième verre, on veut être craint et semer la
terreur. Mais au lieu d'être craint, on finit par être détesté
par son peuple.
En
observant le comportement actuel du Président du Mali, on a le
sentiment étrange qu'il a bu les trois verres d'un trait, du fait de
la rapidité avec laquelle l'enthousiasme populaire de départ a cédé
la place au plus grand désarroi. Et s'il existait un baromètre
fiable de l'opinion publique nationale, nul doute qu'il battrait le
record d'impopularité de l'actuel président français.Son divorce
rapide avec son peuple, à un semestre de sa prise du pouvoir, semble
venir avant tout du choix malencontreux et à chaque fois raté des
hommes de son entourage. On avait espéré et cru qu'il avait
compris, tout compris, lui qui avait assisté à tout, d'un bout à
l'autre, à la dégénérescence de la démocratie malienne et à la
faillite de l’État. Il en avait été le témoin voire l'un des
acteurs privilégiés parfois. Il connaît la réalité des
institutions et des hommes. Il ne peut donc se prévaloir d'aucune
excuse. Il sait ce qu'il fait et pourquoi il a choisi tel ou tel
individu. Il connaît sa garde rapprochée en dehors et au sein de
son parti, garde rapprochée plus affairiste que militante,
incompétente et vindicative à souhait. Elle est aujourd'hui au cœur
de son système de gouvernement dont le credo s'illustre parfaitement
dans cette proclamation faite déjà en 2002, assez parlante
d'elle-même selon laquelle "IBK serait son projet de société".