Le 26 janvier, les forces de l’ordre ouvraient le feu contre les élèves de
terminale du lycée Pascal Yoadimnadji de Doba, dans le sud du
Tchad, qui manifestaient contre la modification des règles
d’inscription au baccalauréat, faisant cinq morts, dont trois lycéens.

Le 21 février, Laurent Fabius se rendait à Ndjaména pour assurer le
Président Idriss Déby de l’amitié chaleureuse du Président français. La
France a fait du Tchad la base de son dispositif Barkhane, censé
combattre la menace djihadiste au Sahel. Ce même Fabius dirigeait le
gouvernement qui, en 1986, installait le dispositif Épervier, par lequel la
France affirmait son emprise militaire sur ce pays. Le prétexte était
alors de le protéger des menées de Kadhafi.
En réalité, depuis la pseudo-indépendance de 1960, le Tchad connaît
un état de guerre permanent, en dépit - à cause ? - de la tutelle étroite
de l’armée et des services français. Dès les années soixante la France
s’ingérait militairement pour défendre le pouvoir en place contre la
rébellion, qui en 1975 capture et exécute le commandant Galopin,
membre du SDECE et chef de la garde nationale tchadienne. La
France s’enracine militairement via l’installation des dispositifs Manta
et Epervier. Nul ne peut prendre la tête de l’État tchadien sans son
aval. Elle décide de soutenir la dictature sanglante d’Hissène Habré
avant de le remplacer par son chef d’Etat-major, formé à l’Ecole
supérieure de guerre de Paris, le cruel Idriss Déby Itno. Elle n’a jamais
en revanche eu un geste pour les représentants de l’opposition
pacifique et démocratique à la dictature, quand elle ne s’est pas faite
auteur ou complice de leur élimination, depuis le docteur Outel Bono,
assassiné par un agent des services français à Paris en 1973 jusqu’au
Pr Oumar Mahamat Saleh, arrêté à Ndjamena lors de la crise de 2008
et qu’on n’a plus revu depuis.
Déby est étroitement dépendant de l’armée française, à laquelle il
doit son maintien au pouvoir, notamment face à la rébellion de 2008.
En retour, il implique son pays, pourtant l’un des plus misérables au
monde, dans les opérations militaires françaises au Mali et en
Centrafrique, qu’il fournit en chair à canon. Surtout, il se pose
désormais comme rempart contre les attaques de Boko Haram au
Niger, au Nigeria et au Cameroun, attaques qui se concentrent sur la
cuvette du lac Tchad, riche d’importantes ressources pétrolifères.
Il est probablement en réalité le plus grand déstabilisateur de
l’Afrique subsaharienne depuis la fuite de Compaoré. Sa responsabilité
dans la guerre civile qui déchire la Centrafrique est incontestable.
Quant à son rôle exact à l’égard de Boko Haram, il suscite beaucoup
d’interrogations. Certains chez ses voisins camerounais ou nigérians
le soupçonnent d’avoir parmi ses proches des affairistes susceptibles
d’approvisionner Boko Haram. On cite Nourredine Adam, une des
têtes de la Seleka en Centrafrique, et le milliardaire nigérian Ali Modu
Sheriff, très actif au Tchad dans le domaine pétrolier.
Laurent Fabius avait tenu à faire savoir naguère que « Bachar al
Assad ne méritait pas d’être sûr terre ». C’est là un jugement moral
bien plus sévère que ceux qu’on reproche à des associations telles
que Survie, que la volaille qui fait l’opinion accuse de faire preuve
d’une moraline mal placée. Comment justifier dès lors qu’on aille
cajoler le premier en Afrique à avoir recruté des enfants-soldats ? Le
socialisme français aurait-il besoin de ce sang-là ?
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