L'Afrique
au secours de l'Afrique
224 p.
Éditions de l'Atelier, 2009 (édition de poche 2010)
Il démarre « L'Afrique au secours de l'Afrique » en décrivant « les trois handicaps qui sont au cœur du mal africain » : le déni par les détracteurs des Africains de « leur contribution à l'édification d'une civilisation de l'universel » (1) ; la « capacité d'auto-nuisance » qu'ont les Africains (malgouvernance, corruption, division…) ; et les conséquences de longues périodes d'esclavage et de colonisation.
224 p.
Éditions de l'Atelier, 2009 (édition de poche 2010)
Il démarre « L'Afrique au secours de l'Afrique » en décrivant « les trois handicaps qui sont au cœur du mal africain » : le déni par les détracteurs des Africains de « leur contribution à l'édification d'une civilisation de l'universel » (1) ; la « capacité d'auto-nuisance » qu'ont les Africains (malgouvernance, corruption, division…) ; et les conséquences de longues périodes d'esclavage et de colonisation.
La pauvreté
des pays africains, dit-il, a des causes structurelles : stratégies
erronées de développement, dette, pratiques commerciales discriminatoires,
persistance des institutions coloniales dont le franc CFA.
Suit une
critique des institutions financières internationales (accord de prêts en
échange d'une libéralisation de l'économie), de l'aide publique au
développement et de l'Organisation Mondiale du Commerce.
Le boulet du
franc CFA
![]() |
Sanou Mbaye, ancien haut fonctionnaire
de la Banque africaine de développement, est un chroniqueur politique et économique. Ses écrits sur le développement des pays africains proposent des politiques alternatives à celles mises en place, en Afrique, par des Occidentaux et leurs bras alliés : le FMI et la Banque mondiale. On peut visiter son blog |
Le franc
handicape les pays de la zone CFA d'abord par sa convertibilité (restreinte à
l'euro, avec un libre transfert de capitaux mais uniquement vers la France).
Cette convertibilité n'est pas adaptée aux structures économiques actuelles des
pays de la zone CFA : la non-convertibilité d'une monnaie, au contraire,
peut permettre un contrôle des changes positif (qui donne à un gouvernement la
possibilité d'allouer les devises, c.à.d. les entrées en monnaie étrangère, en
priorité au développement des secteurs de l'économie qu'il juge
prioritaires : par exemple, la production alimentaire, la santé…).
Par
ailleurs, en échange de la convertibilité, la France impose aux États africains
de déposer 50 % de leurs réserves de change au Trésor public français. Si
ces dépôts (« comptes d'opérations ») sont créditeurs (c'est le cas
le plus souvent), la France verse au pays africain concerné un intérêt
(faible) ; s'ils sont débiteurs, la France prête ces sommes à taux élevé.
Ainsi, des
sommes qui pourraient être investies dans le développement économique des pays
CFA, selon leurs choix, dorment au Trésor français.
Autre
problème du franc CFA, son taux de change fixe (par rapport à l'euro). Il est
défavorable aux pays africains, qui exportent surtout des matières premières
dont le prix est fixé en dollars (depuis sa création, l'euro s'est apprécié par
rapport au dollar) et importent, majoritairement, des produits français en
euros.
La
constitution de deux zones CFA (BCEAO-UEMOA en Afrique de l'Ouest et BEAC-CEMAC
en Afrique centrale) est un autre handicap : les CFA de ces deux zones ne
sont pas interchangeables, ce qui freine les relations commerciales entre
elles.
Pour un
changement intégral de système
Sanou Mbaye
propose d'aller sur « la voie des réformes », c'est-à-dire vers un
« changement intégral de système ».
Les pays
africains, dit-il, doivent d'abord recouvrer la gestion de leurs réserves de
change (passées et à venir).
Il faut
supprimer la convertibilité du CFA.
Il propose ensuite
la création d'une coopération monétaire entre les pays de la région, du type
SME (système monétaire européen). Ce Système Monétaire Africain aurait pour
objectifs la stabilité entre les monnaies des pays concernés et le
rapprochement de leurs économies : réduction de l'instabilité des changes,
réduction de l'inflation, union douanière, marché commun, union politique et
monétaire.
Trois outils
seraient à la base de cette coopération monétaire : une unité de compte de
référence (comme l'Europe a eu son « écu », avant de créer
l'euro) ; un mécanisme des taux de change et d'intervention (établissant
la relation et l'équilibre entre les différentes monnaies) ; et un fonds
de coopération monétaire (gestion des devises, des relations entre les banques
et les instituts d'émission, de la stabilité des monnaies, fonds de cohésion
pour la mise à niveau des économies les plus faibles).
Cette union
politique et monétaire aurait pour point mire la constitution États-Unis
d'Afrique.
L'Union
Africaine
Sanou Mbaye
évoque ensuite un plan d'action pour un développement de l'Afrique sur la base
d'une Union Africaine.
Cela passe
selon lui par la mobilisation des ressources (se réapproprier les matières
premières), par le renouvellement de l'exercice du pouvoir selon des principes
plus désintéressés.
Puis par une
nouvelle stratégie de développement : marché commun, contrôle des
ressources naturelles, contrôles des changes et des mouvements de capitaux,
mesures protectionnistes (un thème très peu développé), usage à grande échelle
du microcrédit, développement respectueux de l'environnement, contestation de
la légalité des dettes.
Suit un
chapitre sur la nécessité d'un « parapluie sécuritaire africain »,
dans l'esprit d'une « force panafricaine d'interposition travaillant de
concert avec la communauté internationale ». Tout en souhaitant la
fermeture des bases françaises et en s'opposant à l'arrivée des Américains.
Manière pour l'Afrique de se soustraire à « des conflits occidentaux qui
lui sont totalement étrangers ».
Le livre
s'achève sur un plaidoyer pour un rééquilibrage mondial, où l'Afrique tiendrait
sa place. Sur une critique de la mondialisation et du « Consensus de
Washington » (qui prône la diminution du rôle des États, la libéralisation
du commerce et du marché de capitaux, la dérégulation…). Et enfin sur un
souhait de réforme du système monétaire international.
Sanou Mbaye,
dans ce livre, décrit bien les effets du colonialisme monétaire que la France
exerce à travers le franc CFA. Il le relie à la domination de la mondialisation
néolibérale. Il décrit ensuite un nouveau système économique et monétaire pour
les pays africains, en passant très vite sur l'aspect économique.
Ce système
paraît assez cohérent mais en même temps très idyllique. Sanou Mbaye se
contente d'exposer des principes, somme toute assez théoriques, sans rentrer
dans les écueils qui pourraient subvenir dans la construction de cette nouvelle
donne (sans jeu de mot).
Par
ailleurs, tout en critiquant les abus du libéralisme, il semble faire confiance
aux mécanismes de l'économie de marché.
Note
Note
1) L'auteur
fait référence à Cheikh Anta Diop et ses travaux sur l'antiquité nègre
égyptienne, à Joseph Ki-Zerbo, historien auteur d'une Histoire de l'Afrique
Noire, et à la Charte du Manden.
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