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Blog régional de l'association Survie (Aude, Gard, Hérault,Lozère,Pyrénées-orientales)

lundi 2 mars 2009

MADAGASCAR - DAEWOO FAIT MAIN BASSE SUR LA TERRE


http://www.cyberacteurs.org/

(Signer cette pétition)

Depuis plusieurs mois, la presse fait largement écho d’un phénomène inquiétant pour des millions de petits paysans ayant toujours vécu dans l’extrême pauvreté et d’autant plus affaiblis par la crise alimentaire mondiale actuelle : le rachat massif de terres agricoles dans les pays du Sud par des États tiers et des investisseurs privés. Motifs annoncés : sécuriser l’approvisionnement alimentaire et investir dans une valeur sûre en période de crise. Au détriment de qui ?

Des populations locales – en particulier des petits paysans – qui ne sont malheureusement pas les bénéficiaires de ces investissements dont les produits sont destinés aux pays d’origine des capitaux. Dans ce monopoly de la terre au niveau mondial, le cas de Daewoo est particulièrement révélateur. En novembre 2008, l’entreprise sud-coréenne annonçait en effet avoir signé dès juillet 2008 avec le gouvernement malgache un accord portant sur l’exploitation d’1,3 millions d’hectares de terres, pour la production de maïs et d’huile de palme à destination de la Corée du Sud. Dans un contexte politique aujourd’hui très tendu à Madagascar, Daewoo et le gouvernement malgache multiplient les déclarations contradictoires, mais les organisations de la société civile malgaches sont particulièrement inquiètes et appellent à la transparence et au respect du droit des paysans à la terre.
Face à cet accaparement des terres agricoles, dont l’Affaire Daewoo est emblématique, et dans un climat de durcissement politique à Madagascar, les organisations de la société civile et la population demandent des réponses claires et précises et en appellent à notre solidarité.

Traduction du message
Monsieur Kim Jae-Yong, J’ai été informé/e par Peuples Solidaires, les Amis de la Terre et le Collectif pour la Défense des Terres Malgaches, des négociations en cours entre votre entreprise et le gouvernement malgache, concernant la location pour 99 ans d’1,3 million d’hectares de terres pour produire du maïs et de l’huile de palme, à destination de la Corée du Sud. Je suis extrêmement préoccupé/e par les conséquences que cette transaction aurait sur la souveraineté alimentaire et l’accès à la terre pour les paysans de ce pays et vous exhorte à : - suspendre complètement les actions engagées et les prospections foncière, - faire preuve de la plus grande transparence vis-à-vis de la population malgache et de l’opinion internationale concernant ce projet, notamment sur les bénéficiaires du coût de la location foncière dont vous avez démenti la gratuité. Demander au gouvernement malgache de faire preuve de la même transparence, - respecter le droit des paysans et des populations à disposer de leurs terres.
(Salutations)

Selon le Collectif pour la défense des terres malgaches, constitué en décembre 2008 en réaction à l’annonce faite par Daewoo, « l’opinion publique malgache, informée par la presse internationale, est particulièrement en alerte car plusieurs grands projets déjà en cours à Madagascar démontrent la réalité de contrats dont les termes conjuguent une exploitation drastique des richesses du pays par les investisseurs étrangers avec des bénéfices insignifiants pour la nation et les populations malgaches ». Ce Collectif a réagi en demandant au gouvernement l’arrêt immédiat des actions entreprises avec Daewoo, et la Plateforme nationale des organisations de la société civile de Madagascar a demandé toute la transparence sur la transaction annoncée puis démentie.

Souveraineté alimentaire en danger
Alors que Madagascar semblait s’être engagé depuis quelques années dans une réforme foncière pour sécuriser progressivement le droit des paysans à exploiter leurs parcelles, l’affaire Daewoo a réveillé soudainement les vieux démons d’un néo-colonialisme foncier menaçant la souveraineté alimentaire de l’Ile et les droits fondamentaux des paysans. En effet, l’accord de juillet 2008, annoncé dans la presse en novembre dernier [1] par Shin Dong-Hyun, directeur financier de Daewoo Logistics, portait sur la signature d’un bail emphytéotique de location pour 99 ans sur 1,3 millions d’hectares, c’est-à-dire la « moitié des terres arables » [2] du pays ! Le groupe sud-coréen indiquait également qu’il avait l’intention de se lancer dans la culture de maïs et la production d’huile de palme, pour « renforcer la sécurité alimentaire de la Corée du Sud » [3] et fournir la moitié des importations de maïs de la Corée. Toujours selon Daewoo, la production de maïs devait débuter en 2009 sur 2000 hectares. Au final, 1 million d’hectares de terres seraient consacrés au maïs et 300 000 aux palmiers à huile. Or, les termes du contrat en négociation ne prévoiraient apparemment pas de contrepartie financière. Le « prix de location » consisterait à investir dans les infrastructures nécessaires à la réalisation du projet (routes, irrigation et infrastructures de stockage des récoltes). Mais quel avenir pour les paysans dépossédés de leurs terres dans un pays où plus de 70% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté ?
Si les démentis publiés par Daewoo Logistics insistent sur le fait qu’aucun contrat n’a encore été signé, ils confirment la nature des prospections foncières entreprises sur l’Ile. Très embarrassées, les autorités malgaches ont indiqué en janvier dernier que « Daewoo n’est pas encore propriétaire du terrain soi-disant déjà acquis » [4]. Seule la prospection du terrain aurait été faite. Daewoo devait encore fournir un « business plan ». De nombreuses démarches seraient nécessaires avant l’approbation finale. Mais de nombreux témoignages de paysans locaux indiquent que les protagonistes de cette affaire sont passés à l’acte dans plusieurs régions. Le représentant de Daewoo dans le pays aurait déjà acquis près de 218 000 hectares dans différentes régions. Madagascar Futur Entreprise Group, filiale de Daewoo Logistics à Madagascar, aurait ainsi déposé, dans certains cas déjà couronnés de succès, des demandes d’acquisition de 94 182 hectares dans le district de Brickaville, 33 767 dans le district de Toamasina II, 40 000 dans le district de Vatomandry et plus de 50 000 dans le district de Maintirano. De vastes terrains dans la région Sava seraient déjà également en cours de transfert de propriété. D’autres demandes d’acquisitions seraient enregistrées.

Un cas tristement emblématique
Pour la société civile malgache, il y a deux façons de spolier les paysans et le peuple malgache pour lesquels la terre est un bien sacré et un patrimoine commun : la location de type Daewoo et l’octroi de vastes terres domaniales à un nombre restreint de privilégiés. Tout cela est particulièrement inacceptable. De nombreuses familles vont être directement spoliées par ces transactions qui se font dans la plus grande opacité. D’importants soupçons ont vu le jour quant à l’enrichissement personnel d’un petit nombre d’individus au sommet de l’Etat à l’occasion de cet accord. En outre, alors que les paysans rencontrent de grandes difficultés pour surmonter les procédures leur permettant d’acquérir des titres de propriété, le groupe Daewoo semble avoir bénéficié d’un traitement de faveur particulièrement insupportable pour la population, lui permettant de voir les dossiers d’acquisition de terrain traités rapidement. D’autres questions inquiètent les paysans de l’Ile et ont été déjà soulevés par les experts et la société civile malgache : les plantations de maïs et d’huile de palme destinées à l’exportation en Corée du Sud et ailleurs ne vont-elles pas dessécher les terres agricoles et détruire la biodiversité ? Les semences utilisées ne seront-elles pas transgéniques comme c’est déjà le cas dans plusieurs pays d’Afrique ? Par ailleurs, ce néo-colonialisme foncier ne se limite malheureusement pas à Madagascar, comme le montre le rapport de l’ONG GRAIN, paru en octobre 2008 [5], et détaillant des cas similaires de rachats de terre par des Etats et investisseurs privés. Dans tous les cas recensés, ce sont bien les populations locales, majoritairement paysannes, qui sont directement menacées par cette marchandisation de la terre.
Face à cet accaparement des terres agricoles, dont l’Affaire Daewoo est emblématique, et dans un climat de durcissement politique à Madagascar, les organisations de la société civile et la population demandent des réponses claires et précises et en appellent à notre solidarité.

POUR EN SAVOIR PLUS :
> Le Collectif de défense des terres malgaches s’est constitué en réaction à la transaction annoncée par Daewoo dans la presse. Vous trouverez une pétition adressée au gouvernement malgache sur le site
http://www.terresmalgaches.info > Les Amis de la Terre soutiennent cet Appel. Selon eux, les firmes des pays riches et émergents s’abattent sur le continent africain comme un nuage de criquets. Elles accaparent des terres afin d’assurer leur approvisionnement alimentaire et fournir le marché croissant des agro carburants. Espérant d’hypothétiques retombées économiques, des pays très pauvres accordent des concessions à des investisseurs étrangers sur des terres qui font cruellement défaut aux populations locales pour se nourrir. Madagascar en est le triste exemple. Cet appel sera diffusé dans le réseau des Amis de la Terre à 5000 exemplaires.
> Cet Appel est lancé dans le cadre de la campagne FaimZERO initiée par Peuples Solidaires et ActionAid et qui sera marquée cette année par l’organisation d’un Forum international sur l’accès à la terre, les 18 et 19 avril 2009 à Montreuil. Ce Forum est co-organisé par Peuples Solidaires, la Confédération Paysanne et la FNAB.
Pour en savoir plus et pour s’inscrire, télécharger le programme et bulletin d’inscription

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Madagascar : la course aux terres agricoles, nouvelle pratique de néocolonialisme, par Vololona R., 3/12/2008
Daewoo à Madagascar : "Bonne affaire ou Madagascar va-t-il rester sur sa faim ?, Par Song Jung-a et Christan Oliver et Tom Burgis, Financial Time, 19 novembre 2008

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