par 8 avril 2014
En évitant toute participation au débat public lors
des commémorations en France et au Rwanda du génocide Tutsi quand les
questions sur le rôle de la France étaient sur toutes les lèvres hier,
François Hollande a clairement fait une faute politique et historique
majeure en laissant les acteurs politiques et militaires de l’époque
monopoliser le champ médiatique.
RWANDA | CARL DE KEYZER / MAGNUM PHOTOS POUR LE MONDE
RWANDA | CARL DE KEYZER / MAGNUM PHOTOS POUR LE MONDE
En ce 7 avril, journée internationale de
commémoration du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, Survie et les
associations mobilisées dans la lutte pour la vérité et la justice
autour de ce crime espéraient une prise de parole des autorités
françaises pour reconnaître enfin le rôle qu’elles ont joué durant le
génocide, et que de nouveaux témoignages sont venus illustrer le matin
même [1].
Cette complicité multiforme a été évoquée par plusieurs intervenants lors de la cérémonie du souvenir organisée devant l’Hôtel de Ville de Paris, mais les autorités françaises restent sourdes à la demande de faire toute la lumière sur cet épisode du passé et de publier les archives françaises de cette époque. Ces revendications, qui font consensus auprès d’organisations telles qu’Ibuka, SOS Racisme, Survie et de représentants de partis ou mouvements politiques français, ont été émises en présence d’un membre de la cellule diplomatique de l’Élysée, mais sans autre représentation diplomatique ou protocolaire notable, Anne Hidalgo, annoncée, ayant annulé sa participation.
Plus tard dans la soirée, le représentant du gouvernement français attendu pour la commémoration organisée au siège de l’UNESCO n’a même pas osé se présenter et affronter les critiques qui n’auraient pas manqué de se manifester.
Le court texte diffusé par l’Elysée en fin d’après-midi [2] était déjà venu doucher l’espoir d’une avancée dans la reconnaissance officielle des crimes du passé : quelques mots sur le génocide et ses victimes, des propos incantatoires sur la prévention du génocide, une justification des interventions militaires françaises à l’étranger, une évocation de l’impuissance de la communauté internationale sans un seul mot sur le rôle de la France. Ces quelques phrases et le vide sidéral de leur contenu, en comparaison des propos pourtant insuffisants de Nicolas Sarkozy en 2010, auront suffi à balayer toutes les attentes et à montrer à la face de tous que François Hollande, plutôt que de choisir le camp de la vérité, a préféré céder aux injonctions et menaces d’anciens responsables politiques ou militaires (Alain Juppé, Edouard Balladur, Hubert Védrine, Paul Quilès, l’amiral Lanxade, le général Quesnot, les anciens officiers des opérations françaises au Rwanda regroupés au sein de l’association France-Turquoise) qui usent depuis 20 ans de toute leur influence pour taire les secrets les plus inavouables de l’armée et de la diplomatie française au Rwanda, en bénéficiant d’un large accès aux médias.
Comme l’a évoqué Fabrice Tarrit, président de Survie, lors de sa prise de parole sur le parvis de l’Hôtel de Ville « une poignée de représentants politiques ou militaires ne peuvent pas influencer et monopoliser la parole officielle et l’inscrire contre le cours de l’Histoire. Le cynisme, le déni et le mensonge ne peuvent tenir lieu de politique ».
Cet affront adressé par François Hollande aux victimes est une honte pour nos institutions autant qu’une faute politique et historique majeure.
Contact : Ophélie Latil ophelie.latil@survie.org 01 44 61 03 25
[1] cf. Guillaume Ancel, ancien officier français sur France Culture ou Bernard Kouchner, décrivant des livraisons d’armes aux génocidaires jusqu’en août 1994. Déclaration de Kouchner
[2] Communiqué sur le site de l’Élysée
Photos des victimes du génocide au Rwanda, au sein du mémorial de Kigali. | REUTERS/NOOR KHAMIS
Cette complicité multiforme a été évoquée par plusieurs intervenants lors de la cérémonie du souvenir organisée devant l’Hôtel de Ville de Paris, mais les autorités françaises restent sourdes à la demande de faire toute la lumière sur cet épisode du passé et de publier les archives françaises de cette époque. Ces revendications, qui font consensus auprès d’organisations telles qu’Ibuka, SOS Racisme, Survie et de représentants de partis ou mouvements politiques français, ont été émises en présence d’un membre de la cellule diplomatique de l’Élysée, mais sans autre représentation diplomatique ou protocolaire notable, Anne Hidalgo, annoncée, ayant annulé sa participation.
Plus tard dans la soirée, le représentant du gouvernement français attendu pour la commémoration organisée au siège de l’UNESCO n’a même pas osé se présenter et affronter les critiques qui n’auraient pas manqué de se manifester.
Le court texte diffusé par l’Elysée en fin d’après-midi [2] était déjà venu doucher l’espoir d’une avancée dans la reconnaissance officielle des crimes du passé : quelques mots sur le génocide et ses victimes, des propos incantatoires sur la prévention du génocide, une justification des interventions militaires françaises à l’étranger, une évocation de l’impuissance de la communauté internationale sans un seul mot sur le rôle de la France. Ces quelques phrases et le vide sidéral de leur contenu, en comparaison des propos pourtant insuffisants de Nicolas Sarkozy en 2010, auront suffi à balayer toutes les attentes et à montrer à la face de tous que François Hollande, plutôt que de choisir le camp de la vérité, a préféré céder aux injonctions et menaces d’anciens responsables politiques ou militaires (Alain Juppé, Edouard Balladur, Hubert Védrine, Paul Quilès, l’amiral Lanxade, le général Quesnot, les anciens officiers des opérations françaises au Rwanda regroupés au sein de l’association France-Turquoise) qui usent depuis 20 ans de toute leur influence pour taire les secrets les plus inavouables de l’armée et de la diplomatie française au Rwanda, en bénéficiant d’un large accès aux médias.
Comme l’a évoqué Fabrice Tarrit, président de Survie, lors de sa prise de parole sur le parvis de l’Hôtel de Ville « une poignée de représentants politiques ou militaires ne peuvent pas influencer et monopoliser la parole officielle et l’inscrire contre le cours de l’Histoire. Le cynisme, le déni et le mensonge ne peuvent tenir lieu de politique ».
Cet affront adressé par François Hollande aux victimes est une honte pour nos institutions autant qu’une faute politique et historique majeure.
Contact : Ophélie Latil ophelie.latil@survie.org 01 44 61 03 25
[1] cf. Guillaume Ancel, ancien officier français sur France Culture ou Bernard Kouchner, décrivant des livraisons d’armes aux génocidaires jusqu’en août 1994. Déclaration de Kouchner
[2] Communiqué sur le site de l’Élysée
Photos des victimes du génocide au Rwanda, au sein du mémorial de Kigali. | REUTERS/NOOR KHAMIS
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